Mécanisme post-ARENH : une nouvelle ère pour la régulation nucléaire

3/3/2025
Mécanisme post-ARENH : une nouvelle ère pour la régulation nucléaire

À l'aube de 2026, le paysage énergétique français s'apprête à subir une transformation majeure avec la fin de l'Accès Régulé à l'Électricité Nucléaire Historique (ARENH). Instauré en 2011, ce dispositif permettait aux fournisseurs alternatifs d'acheter une partie de la production nucléaire d'EDF à un tarif régulé, garantissant ainsi une concurrence équitable et une certaine stabilitédes prix pour les consommateurs. Cependant, face aux évolutions du marché et aux exigences européennes, l'ARENH sera remplacé par un nouveau mécanisme moins préjudiciable à EDF.

Rappel sur le mécanisme de l’ARENH

L'ARENH, permet aux fournisseurs d'électricité alternatifs d'acheter une partie de l'électricité produite par le parc nucléaire historique d’EDF à un prix régulé fixé par les pouvoirs publics. Ce prix est de 42 euros par mégawattheure (MWh). Le volume d'électricité accessible via ce mécanisme est plafonné à 100 térawattheures (TWh) par an.

Ce dispositif a été mis en place à la suite de différents décrets européens pour favoriser la concurrence et protéger les consommateurs. Cependant, la contrainte du plafonnement pour les fournisseurs alternatifs et le prix régulé jugé trop bas par EDF nécessitent une refonte du dispositif pour une gestion plus juste de la fourniture d’électricité nucléaire française.

Le Versement Nucléaire Universel (VNU) : une nouvelle ère pour la régulation nucléaire

Le projet de loi de finances 2025 introduit le Versement Nucléaire Universel (VNU), destiné à succéder à l'ARENH dès le 1ᵉʳ janvier 2026. Contrairement à l’ARENH, ce nouveau dispositif concerne l’intégralité de la production nucléaire d’EDF qui pourra être vendu sur le marché de gros, avec un prix de base estimé autour de 70€/MWh, soit bien au-dessus des 42€/MWh de l’ARENH.

Ce mécanisme repose sur une taxation progressive des revenus issus de la vente de l'électricité nucléaire, avec des taux variant entre 50 % et 90 % au-delà de certains seuils de prix. L'objectif est de redistribuer une partie de ces profits d'EDF aux consommateurs, limitant ainsi l'impact des fluctuations du marché sur leur facture énergétique.

Concrètement, lorsque le prix de vente de l'électricité dépasse le seuil de 70€/MWh, une partie des revenus supplémentaires est prélevée et redistribuée aux consommateurs.

- 50% des revenus au-delà d’un seuil médian (70 – 110 €/MWh)

- 90% des revenus au-delà d’un seuil haut (110€/MW)

Ce système vise à protéger les consommateurs des hausses soudaines des prix de l'électricité tout en maintenant la rentabilité d'EDF.

 

Les Contrats d'Allocation de Production Nucléaire (CAPN) : un soutien aux industries électro-intensives

Parallèlement au VNU, des Contrats d'Allocation de Production Nucléaire (CAPN) seront mis en place pour les industries fortement consommatrices d'énergie. Ces contrats, d'une durée comprise entre 7 et 15 ans, offriront aux entreprises un approvisionnement stable en électricité à des conditions tarifaires prévisibles. En contrepartie, ces industries participeront aux risques industriels liés à la production nucléaire, établissant ainsi un partenariat renforcé avec EDF.

 

Les enjeux et perspectives du nouveau dispositif

La mise en œuvre du VNU et des CAPN vise à répondre à plusieurs défis majeurs :

  • Stabilité des prix pour les consommateurs : En redistribuant une partie des revenus excédentaires d'EDF, le VNU ambitionne de protéger les ménages et les petites entreprises des variations abruptes des prix de l'électricité.
  • Compétitivité des industries : Les CAPN offrent aux industries électro-intensives une visibilité à long terme sur leurs coûts énergétiques, favorisant ainsi leur compétitivité sur le marché international.
  • Conformité aux directives européennes : En réformant le cadre de régulation du nucléaire, la France entend se conformer aux exigences de l'Union européenne en matière de concurrence et de transparence sur le marché de l'énergie.
  • Pérennité d’EDF : En supprimant le prix fixé à 42€/MWh le gouvernement permet à EDF de compenser ses coûts de production d’en moyenne 70€/MWh.

Toutefois, les modalités précises de redistribution aux consommateurs est un point qui reste à préciser. La Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) jouera un rôle central en évaluant périodiquement les coûts de production et en veillant à la bonne application du nouveau dispositif.

 

Les réticences envers ce nouveau mécanisme

Selon UFC-Que Choisir, ce nouveau mécanisme profite à EDF au détriment des consommateurs car les prix de vente de l’électricité pourraient augmenter drastiquement et s’éloigner durablement du coût de production en France. L'Union Fédérale des Consommateurs estime également que le système de redistribution serait trop limité pour compenser la flambée des prix. Les consommateurs devront payer en moyenne 19% de plus, soit jusqu’à 250€ supplémentaire par an pour un foyer moyen.

L'amélioration de l'efficacité énergétique est la solution la plus pérenne pour faire face à la hausse des prix de l’énergie. En optant pour des équipements moins énergivores, il est possible de réduire significativement ses factures d’énergie. De plus, les primes CEE offrent un soutien financier pour ces travaux de rénovation, pouvant même parfois couvrir l’intégralité des coûts d’installation.

En conclusion, la fin de l'ARENH marque une étape cruciale dans la transformation du marché de l’électricité français. Le déploiement du VNU et des CAPN témoigne d'une volonté d'adapter la régulation nucléaire aux réalités contemporaines, tout en protégeant les intérêts des consommateurs et en soutenant la compétitivité industrielle. Les mois à venir seront déterminants pour finaliser les contours de ce nouveau cadre et assurer une transition harmonieuse vers cette nouvelle ère énergétique.

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