L’objectif de cette analyse est de fournir une mise à jour sur l’avancement de l’obligation de la 5e période et d’affiner l’analyse de la récente hausse des prix. Nous verrons les effets des prochaines annonces et évènements sur le prix des certificats.
Depuis notre publication d’avril 2024, le contexte a changé. La publication de la Cour des comptes a rendu le marché plus incertain que jamais quant au futur du dispositif. Nous pouvons néanmoins dresser les comptes avec les données fournies dans la présentation ainsi que celles de la lettre d’information du mois de septembre 2024 sur la P5 :
Ainsi, pour estimer la situation à la fin de la 5e période, nous comparerons la production (délivrance des volumes) à l’obligation. Nous prendrons une production égale à la moyenne des délivrances jusqu’aux dernières données fournies.
Les obligés feront face à un manque de CEE Classiques ainsi qu’un manque de CEE Précarité :
57.16 TWhc de Classiques et 22.12 TWhc de Précarité devront être délivrés tous les mois afin d’obtenir au 31/12/2025 un volume de délivrances égal au besoin de l’obligation. La production mensuelle de CEE Classiques doit donc augmenter de 42% par rapport à la moyenne entre janvier 2022 et juin 2024. De plus, il est nécessaire d’augmenter la production de précarité de 27% par rapport à celle entre janvier 2022 et juin 2024.
Voici une projection de l’état du stock de certificats au 1er janvier 2026 en fonction de la production entre juillet 2024 et décembre 2025.
Depuis notre dernière analyse, le prix des certificats d’économies d’énergie a grandement augmenté et atteint aujourd’hui 8.45 €/MWhc pour les CEE Classiques et 9.15€/MWhc pour les CEE Précarité.
La hausse récente des prix peut être attribuée à trois facteurs principaux :
1. Manque de production : On constate un ralentissement de la production de CEE sur le classique mais surtout sur la précarité. La peur de ne pas pouvoir compléter leur obligation rend les obligés plus enclins à payer des primes plus importantes et de tirer les prix vers le haut.
2. Volumes en instruction : Un nombre important de volumes sont encore en instruction et génèrent une incertitude quant aux volumes délivrés.
3. Incertitude : L’approche de la fin de la période et les inquiétudes quant à l’avenir du dispositif rendent le marché attentiste et tirent les prix à la hausse.
Différents leviers peuvent être actionnés pour permettre une régulation du marché :
· La hausse de prix devrait pousser les installateurs à augmenter la production des CEE ce qui pourrait contribuer à faire baisser les prix.
· 422 TWhc sont en cours d’instruction auprès du PNCEE : 290 TWhc de CEE Classiques et 132 TWhc de CEE Précarité. Leur délivrance, même partielle peut aussi contribuer à la baisse des prix.
· Le constat fait par les autorités de la faible production de CEE créerait une fiche Coup de pouce augmentant ainsi la production de certificats et induirait une baisse des prix.
Les volumes délivrés en ce début d’année 2024 ne permettent pas aux obligés de couvrir leur obligation. Si les certificats en cours d’instruction sont délivrés par le PNCEE sur une courte période, nous pouvons nous attendre à une baisse rapide du prix des certificats.
Au manque de visibilité s’ajoutent de nombreuses interrogations sur la 6e période.
Enfin, la nomination d’un nouveau gouvernement suite à la dissolution de l’Assemblée nationale donne davantage de poids à des mouvances politiques moins enclines à apporter leur appui au dispositif des CEE. Le rapport de la Cour des comptes rend le dispositif incertain et dépendant de la couleur politique des futurs gouvernements. Cela crée de l’incertitude auprès des différentes contreparties embrumant les perspectives sur le marché.
Le manque de gisement se fait ressentir sur le marché primaire et fait logiquement chuter le nombre de rénovations énergétiques. L’effet « d’aubaine » dans les fiches, auparavant constaté par les installateurs, n’est plus d’actualité.
Nous avons donc de sérieux doutes sur la capacité de production de CEE tant les fiches permettant la production de gros volumes se raréfient. Les acteurs sont dans l’attente de nouvelles bonifications et d’hypothétiques nouvelles fiches à exploiter pour retrouver une production à la hauteur de l’obligation.
La raréfaction des CEE Précarité – d’ores et déjà en pénurie sur le marché secondaire spot – couplée au manque de visibilité sur les gisements et par extension dépôts et délivrances, provoque une forte montée de leur valorisation pour toutes les maturités.
Le marché secondaire des CEE est en attente d’annonces de la part du gouvernement concernant la 6e période. Cette incertitude défavorise la liquidité des transactions et rend le marché amorphe.
Enfin la Commission des Finances, qui a réuni les différents partis politiques pour dresser le bilan du dispositif et éventuellement proposer une alternative ne semble pas, pour l’heure, avoir abouti à une solution pour parer aux inconvénients des CEE sans créer d’autres imperfections. Nous sommes donc confiants quant au maintien du dispositif, ce qui à son annonce devrait rassurer les acteurs et rendre le marché plus liquide.
[1] « Comitéde pilotage CEE », Ministère de l’économie, des Finances et de lasouveraineté industrielle et numérique, 29 février 2024. https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2024-02-29%20COPIL%20CEE.pdf
[2] « Les certificats d’économies d’énergie », Cour des comptes, 17 septembre 2024. https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-certificats-deconomies-denergie-0
[3] « Lettre d’information » , Ministère de l’économie, des Finances et de lasouveraineté industrielle et numérique, 1 octobre 2024. https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/2024-09%20lettre%20d%27infos%20CEE%20vf.pdf